Refus de soins et "décharges"
Les décharges par l'employeur
La signature d’une « décharge » par le salarié n’a pas de valeur juridique pour exonérer l’employeur de sa responsabilité.
Les décharges par les soignants
Les décharges de soins n’ont aucune valeur juridique dans un contexte pré-hospitalier.
La sortie de l’entreprise engage la responsabilité de l’employeur quelque soit le motif.
L’infirmier.e ne peut qu’orienter, mais ne peut autoriser le départ d’un site.
Cadre réglementaire et scientifique
Fiche 38 de l'observatoire national des violences en milieu de santé
Article L. 4121-1 du Code du travail
Le refus de soins par une personne majeure est possible, y compris dans un contexte professionnel. Toutefois, pour que ce refus soit juridiquement et éthiquement recevable, plusieurs conditions doivent être réunies, conformément aux recommandations de l’Observatoire national des violences en milieu de santé :
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Information médicale préalable : le médecin doit informer le salarié de manière claire, honnête et compréhensible sur son état de santé, les soins proposés, ainsi que les risques liés à leur refus.
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Confirmation écrite : si le salarié maintient son refus, les éléments d’information sont repris par écrit. Ce document respecte le secret médical et est remis au salarié en présence d’un professionnel de santé témoin.
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Validation médicale : l’information doit être délivrée par un médecin, qui s’assure de sa complétude et de sa clarté.
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Relecture et signature : le document est relu à voix haute au salarié. Sa signature n’est demandée qu’après s’être assuré qu’il en comprend bien le contenu.
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Refus de signer : si le salarié refuse de signer, un procès-verbal de constat de refus est rédigé, également en présence d’un professionnel de santé tiers.
Une fois ces étapes accomplies, la sortie ou la fin de prise en charge est possible. Le processus est alors complété par :
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L’envoi d’un courrier au médecin traitant précisant les circonstances du refus de soins.
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L’envoi d’un courrier au salarié, rappelant l’intérêt du traitement, la possibilité de revenir sur sa décision, et les contacts utiles pour cela.
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La vérification concrète du retour à domicile dans des conditions de sécurité suffisantes.
Obligations de l’employeur en cas de refus de soins 📌
L’employeur ne peut pas forcer un salarié à accepter un soin ou une intervention médicale, sauf exceptions encadrées par la loi (ex. aptitude à un poste de sécurité, risque grave pour autrui).
Toutefois, le refus de soins ne décharge pas l’employeur de son obligation de sécurité prévue à l’article L. 4121-1 du Code du travail. Il lui revient donc de :
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S'assurer que le salarié a eu accès à une information claire et à un professionnel de santé compétent.
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Documenter la situation via la remontée d'évenements indésirables dans l'organisation.
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Adapter le poste si nécessaire, en lien avec la médecine du travail, en cas de risque résiduel ou aggravé.
L’employeur reste responsable de l’évaluation des risques collectifs et individuels, et peut être tenu pour négligent en cas d’absence d’actions adaptées à la situation.
Proposition de fonctionnement conforme à la réglementation et à la déontologie
Les conditions strictes posées par l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS) pour qu’un refus de soins soit recevable ne peuvent être pleinement mises en œuvre en entreprise que dans un cas bien particulier : la présence sur site d’un médecin et d’un second soignant témoin.
En pratique, cette configuration est rare. L’infirmier(ère) en entreprise doit donc :
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Évaluer la situation, notamment la gravité des signes ou des symptômes.
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Orienter vers un avis médical adapté (le médecin du 15, médecin du travail ou médecin traitant).
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Agir dans le respect de sa sécurité et de celle du salarié.
Un départ du salarié sans prise en charge par un professionnel de santé (IDE, médecin ou au moins secouriste) et sans évaluation médicale préalable engage la responsabilité de l’employeur. Ce manquement contrevient à l’article R.4224-16 du Code du travail, qui impose la mise en œuvre des premiers secours sur le lieu de travail.
Par ailleurs, selon le référentiel technique du secourisme, un secouriste ne peut pas différer un appel médical, même à la demande de la victime :
« Le SST doit obtenir immédiatement un avis médical. Cet appel ne doit pas être différé, même à la demande de la victime. »
Guide des données techniques – Version 4.07.20
En l’absence d’un médecin sur place, la seule manière acceptable de valider un refus de soins est donc d’obtenir et d’enregistrer un avis médical par le centre 15, via l’IDE ou un secouriste habilité.
Enfin, si le passage à l’infirmerie est prévu dans le règlement intérieur en cas de symptômes, blessures ou malaises, un refus de s’y rendre peut être considéré comme une infraction disciplinaire, notamment s’il précède une demande de sortie anticipée sur le temps de travail.
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